Le remboursement de l’avance consentie à un interprète

Le remboursement de l’avance consentie par un producteur à un interprète : prohibition de la cession de la créance de rémunération légale due à l’artiste. La loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création à l'architecture et au patrimoine, que nous continuons d’étudier, a pour intérêt encore d’avoir prohibé les cessions de créance, au profit du producteur, portant sur des droits de rémunération légaux dus à l’artiste : en pratique, on vise par là les droits pécuniaires provenant de la rémunération équitable et de la rémunération pour copie privée. On sait que les Sociétés de gestion collective regroupant les artistes-interprètes, schématiquement l’ADAMI pour les artistes principaux, la SPEDIDAM pour les artistes d’accompagnement, ne font guère que perçoir que ces deux dernières rémunérations légales : leur part, à hauteur de 50% (l’autre moitié revenant aux producteurs), dans la « rémunération équitable » versée pour la diffusion libre d’enregistrement par les radios et lieux publics comme les discothèques, en vertu de la « licence légale » de l’art. 214-1 C.p.i. (RE) ; et leur part dans la rémunération pour copie privée, mise en place par une loi de 1985 (RCP). Or les producteurs, lorsqu’ils avaient versé une avance à un interprète principal – pour lui permettre d’être rémunéré sans attendre la l’intéressement proportionnel sur les ventes futures d’exemplaires de l’interprétation – avaient essayé d’obtenir le remboursement de cette somme, non seulement en déduction des recettes à venir de l’exploitation, mais aussi par le biais d’une cession de créance sur ces rémunérations légales attendues de l’artiste. En droit pur, il n’y avait rien ce choquant à ce qu’un interprète consente cette cession de créance et ne reçoive de la société de gestion qu’une rémunération légale diminuée de ce qu’il restait débiteur envers le producteur : donc, une part RE et de RCP diminuée un montant restant à devoir sur les avances. Pourtant, sentant le caractère éminemment personnel de ces rémunérations, les sociétés de gestion collectives concernées avaient résisté à la prétention des producteurs. L’art. 212-1, al. 3, C.p.i., issu de la loi de 2016, protégeant ainsi les interprètes, interdit désormais cette possibilité en ces termes : « Lorsque l'artiste-interprète cède à un producteur de phonogrammes une créance sur les rémunérations provenant d'exploitations à venir de sa prestation en contrepartie d'une avance consentie par ce dernier, cette cession ne peut porter sur les rémunérations mentionnées aux articles L. 214-1 (visant la RE) et L. 311-1 (visant la RCP). Toute clause contraire est nulle » (sur le sujet, et plus généralement sur les relations entre interprètes et producteurs, v. V. Varet et S. Maury, Les contrats de production phonographiques à l’aune de la loi « Création et patrimoine » du 7 juillet 2016, Légipresse n° 342, oct. 2016, p. 523 s.). 

Publié le : 
07 Décembre 2016
Auteur de l'article : 
Jérôme Huet
Source(s) : 
Wikipedia