Jelly Roll Morton

De son vrai nom Ferdinand Joseph Lamothe, Jelly Roll Morton est un pianiste et chanteur de jazz américain, né aux environs de 1885 et selon son certificat de baptême, ses parents étaient F. P. Lamothe et Louise Monette (écrit Lemott et Monett sur le certificat de baptême). D'origine créole et française, son beau-père s'appelait Mouton, d'où le pseudonyme de Morton. Le Jelly roll qui a donné son surnom est un gâteau roulé comportant une connotation sexuelle (nom argotique du vagin). Vers 1900, il jouait déjà du piano dans les nombreuses maisons closes de Storyville, sachant interpréter tous les genres de l'époque, du ragtime aux mélodies espagnoles très demandées à ce moment-là. De 1900 à 1920, il aurait voyagé partout : de New York à la Californie en passant par le Canada, le Kansas et la Floride. On le sait à Chicago en 1912 parce que c'est là qu'il fait enregistrer ses premières compositions. De 1915 à 1920, il aurait vécu à Los Angeles aux côtés des célèbres Spike Brothers. Lorsqu'il arrive à Chicago, c'est un Jelly Roll hautain, dédaigneux, flamboyant, presque exaspérant qui prend la ville d'assaut. Il clame sur tous les toits que toutes les musiques qu'on y joue ne sont que de pâles imitations de ses nombreux styles ; que c'est lui qui a inventé le jazz : il donne même une date, 1902. Ses vêtements proviennent des plus grands tailleurs, il aime payer ses notes avec des billets de mille dollars et, à un certain moment, il se fait même poser un diamant à la place d'une incisive. Il est détesté par tous ceux qui le rencontrent mais, en même temps, très respecté car sa culture musicale, ses interprétations, sa mémoire prodigieuse impressionnent tous les musiciens qui le côtoient. Il joue au billard, aux cartes, se promène souvent en compagnie de deux femmes, car il plaît aux dames. On dit même qu'il aurait été un proxénète aux revenus très importants. Musicalement, à la seule mention de son nom, les salles se remplissent. Jelly Roll Morton, a fait plus que quiconque pour instaurer entre 1922 et 1930 ce qu'on allait appeler le jazz. Sur ses cartes de visite, on pouvait lire « Inventor of Jazz » (« inventeur du jazz »), « Originator of Stomp and Swing » (« créateur du stomp et du swing »), « World's Greatest Hot Tune Writer » (« le plus grand auteur de morceaux hot au monde ») et, plus de 60 ans après sa mort, bon nombre de critiques pensent désormais qu'il n'avait peut-être pas tort. Bien sûr, il n'a pas tout inventé mais il a tout transformé. Il a su, par exemple, prendre le rythme syncopé du rag (repris par Scott Joplin, James Scott, etc.), en supprimer le côté rigide de la structure pour en faire une musique plus aérée, plus dégagée, ouvrant la voie aux improvisations d'Earl Hines et des grands pianistes qui allaient le suivre. De la musique orchestrale collective, il a modifié les ensembles improvisés, a écrit des « arrangements » préparant le terrain aux big bands des années 1930. À chacun des musiciens de ses nombreux orchestres (le plus fameux ayant été son « Red Hot Peppers »), il laissa libre cours à presque toutes leurs fantaisies, dégageant l'individu de la masse pour en arriver aux fameux combos qui allaient faire fureur à partir de la fin des années 1940. De 1923 à 1929, il est le musicien des musiciens. Mais, la Grande Dépression aura raison de lui. Ses excentricités, sa façon ostentatoire de se présenter font mauvais goût. Il continue à jouer ici et là, mais c'est le déclin. La santé minée par divers excès, il s'éteint à Los Angeles. Il a laissé de nombreux enregistrements. Il enregistre d'abord des rouleaux de piano pneumatique, puis des disques de piano solo. Puis en 1938, il enregistre chez Circle Records The Saga of Mr Jelly Lord (paru en 1947), une série de 12 volumes 78 tours (45 disques rouges 30 cm, soit 90 faces devant finalement tourner autour de 85 tr/min pour une écoute juste) (republié en 33 tours microsillon en 1950) reprenant des interviews réalisées en 1938 au Coolidge Auditorium de la Bibliothèque du Congrès, qui rend hommage à Jelly Roll Morton et retrace son parcours. Ce travail représente probablement la première « biographie sonore » jamais réalisée concernant un musicien. Vingt-quatre 78 tours pour la Library of Congress (sous la direction d'Alan Lomax) à Washington et publié en CD en 2005 sous le titre The Complete Library of Congress Recordings où il raconte sa vie ponctuant le tout d'une douzaine d'improvisations remarquables au piano. Ses derniers enregistrements avec, entre autres, Sidney Bechet, Albert Nicholas et Sidney de Paris, datent de 1939. Jelly Roll Morton a composé « King Porter Stomp », morceau qu'il a dédié à un pianiste (Porter King) et qui sera repris par de nombreux orchestres des années 1930-1940 (Fletcher Henderson, Benny Goodman) et même par Gil Evans beaucoup plus tard. On peut retrouver l'ambiance de La Nouvelle-Orléans du début du XXe siècle dans le film La Petite de Louis Malle (1978), film dédié à Jelly Roll Morton. On l’écoute sur YouTube dans « Creepy Feeling » :

 

 

Publié le : 
24 Juin 2019
Auteur de l'article : 
jérôme Huet
Source(s) : 
Wikipedia